Pourquoi je cours

Pourquoi je cours (et je fais du sport en général) ?

« Pourquoi tu cours ? », « Après quoi tu cours ? », « Qu’est-ce que tu fuis comme ça ? », « Comment tu trouves l’énergie ? », « Tu es fou ? »,… Quel coureur n’a pas déjà entendu ces fameuses phrases, serinées par ses proches, famille et amis, éberlués par tant d’amour pour la borne et la sueur, quand on pourrait manger des chips devant Netflix. Ce même genre de questions existe pour ceux qui pratiquent le cyclisme, la natation, le fitness,… Vous connaissez forcément cette impression d’être pris pour un OVNI, incompris par des proches imperméables à ce monde d’effort, d’abnégation, et de plaisir aussi. Parce que, vu de l’extérieur, pour les non-pratiquants, le plaisir semble bien caché.

C’est vrai ça, pourquoi décide-t-on de se lever aux aurores pour aller à la piscine, de passer son dimanche à parcourir la Vallée de Chevreuse à deux roues, ou encore d’aller se faire des tours de piste sur le tartan ? Pourquoi sacrifier la douceur des draps protecteurs, des bras chaleureux parfois, une soirée Netflix (& Chill ?), une relaxante pause-déjeuner, pour aller endolorir les muscles et revenir en sueur ?

Question à laquelle il serait plus simple de répondre : « va manger tes chips sur ton canap’ et laisse moi tranquille ». Mais on va essayer de répondre à la question, aussi complexe soit-elle. Oui, complexe. On pourrait croire que c’est simple. Mais il n’y a pas de réponse toute faite, évidente, à part « j’aime ça ». Chaque réponse sera individuelle, personnelle, composée d’une multitude de raisons, parfois difficiles à formuler et même à envisager. Parce que c’est parfois comme une évidence, sans que l’on cherche à savoir pourquoi, comment.

Se maintenir en forme

La première raison pour laquelle je cours, personnellement, est de me maintenir en forme. Faire du sport me permet de me sentir plus actif, plus tonique, plus éveillé. Cela joue sur mon tonus de la journée. Je suis moins fatigué, je dors mieux, je suis capable d’être cérébralement et physiquement plus disponible et actif durant toute la journée.

Physiquement, cela me permet d’avoir un meilleur cardio, une meilleure respiration, de me fatiguer moins pour un effort équivalent, d’être plus endurant. Mais aussi de pouvoir être capable de faire davantage de choses avec mon corps, de ne pas être limité : pouvoir marcher, courir, rouler pendant des heures, me lancer dans de longues randonnées, grimper,… De ne pas me fixer de limites, de pouvoir aller au bout de mes envies.

Crédits Photo : Ilyas Toumlit

Cela me permet également d’avoir un corps plus tonique, plus musclé, plus athlétique. J’ai commencé la course au début afin de mieux contrôler mon poids et ma forme, après quelques errances estudiantines. Et c’est le cas d’encore énormément de gens, c’est la porte d’entrée vers le sport pour beaucoup de néophytes. Alors, aujourd’hui, c’est vrai que j’apprécie que le sport me permette d’avoir un équilibre où je peux me permettre de manger tout ce que je veux sans restrictions, boire autant que je veux, tout en gardant la ligne, et même plus. J’apprécie d’avoir un corps relativement musclé, du moins svelte et un minimum athlétique. Question d’ego, et purement narcissique, et alors ?

Cérébralement, comme je l’ai dit, le sport me permet d’être davantage en forme, moins fatigué, de mieux dormir, d’être moins stressé, de mieux gérer mes émotions. Le sport booste ma concentration, ma capacité à réfléchir, prendre des décisions, à avoir l’esprit clair, vif. 

La recherche de performance

La seconde raison pour laquelle je fais du sport, c’est pour la performance, le dépassement de soi. Comme je l’ai dit, j’ai commencé pour perdre du poids et me maintenir en forme. Et puis, il s’est avéré, qu’à force, je ne courrais pas trop mal, les chronos n’étaient pas dégueulasses. Sont venues les premières ambitions, les premiers objectifs. Puis d’autres. Et encore d’autres, toujours plus élevés. Avec chaque fois davantage d’efforts, davantage d’entraînements. Parce qu’on a rien sans rien.

Je me suis pris au jeu, petit à petit. Finalement, le nul en sport s’est trouvé un moyen de prendre sa revanche sur toutes ces années à être pris en dernier dans les équipes. La vitesse a augmenté, les distances aussi, les chronos sont tombés les uns après les autres. Sur 10 kilomètres, sur semi-marathon, sur marathon.

M’entrainer plus me permet de courir plus vite, de faire davantage de choses, de faire subir plus de choses à mon corps, d’aller chercher toujours plus vite, plus fort, plus haut. 

Jusqu’où ? La performance, c’est bien beau. Les chronos qui s’envolent, c’est magnifique. Mais ça ne durera pas éternellement. Parce que désormais les marges de progression sont évidemment de plus en plus ténues. Parce que je me rapproche forcément de plus en plus du sommet, du moment où je serai arrivé au maximum de mes capacités, même avec beaucoup d’entrainement. Et puis, aussi, parce que malheureusement le temps fera son œuvre. J’ai 27 ans, ce qui me laisse encore un peu de marge devant moi. Notamment pour des distances comme le marathon, mais déjà beaucoup moins pour des distances beaucoup plus cardio comme le 10 kilomètres. Mais le pic de forme passera, et les efforts devront être toujours plus conséquents pour progresser ou même conserver le même niveau.

Alors oui, ça s’arrêtera un jour. Il viendra un moment où les chronos ne progresseront plus, malgré tous les efforts possibles. Il viendra un moment où le plafond sera atteint, où les performances baisseront peu à peu. Quand ? Je ne le sais pas. Est-ce-que ce sera dur ? Oui, inévitablement. Parce que j’aime me challenger, me dépasser, toujours faire mieux, faire mentir les chiffres et aller chercher ces quelques secondes supplémentaires.

Mais j’y suis préparé. Ca arrivera, nécessairement. Ça fera mal, je me battrai et refuserai certainement l’évidence pendant un moment. Mais ça ne sera pas la fin du monde non plus. Il y a tellement d’autres manières de performer, propres à chacun. Parce qu’en soit, ce qui m’intéresse surtout, dans la notion de performance, c’est le fait de me dépasser, de repousser mes limites, de toujours faire mieux, de me lancer des défis à relever. Et la vitesse n’est qu’un paramètre parmi d’autres.

L’amour du défi, du dépassement de soi

Il y a d’autres défis, déjà aujourd’hui, et il y en aura d’autres encore à venir. Ce n’est pas grave de courir moins vite. Qu’importe le flacon, pourvu qu’on ait l’ivresse. On peut courir plus longtemps, sur davantage de distance. Se lancer sur plein d’autres belles courses, sur des trails de montagne, des ultra-trails, des triathlons,… Il y a tout un univers d’autres challenges sur lesquels se lancer. J’ai envie d’aller faire des courses plus longues, de repousser mes limites dans les montagnes, de passer des dizaines d’heures à marcher et courir en m’avalant du saucisson et du fromage. Ou encore de rouler pendant des heures, d’aller franchir des cols, de faire des étapes longues. D’enfin apprendre à nager correctement, de faire autre chose que barboter.

Il y a même tant d’autres défis qui ne nécessitent pas forcément de porter un dossard. Juste une belle idée à la con comme j’en ai tant, une grosse journée sportive, un grand chemin de randonnée qu’on a envie de se faire, une escapade cycliste de plusieurs jours,… La liste est infinie, la seule limite est celle de l’imagination.

Je ne me fais pas de soucis là-dessus, je trouverai pendant encore longtemps de quoi alimenter la flamme, de quoi aller chercher mes limites, me challenger. Il y a tellement de belles choses à faire, de beaux moments à aller vivre encore.

Ce que j’aime, ce n’est pas tant de courir vite, ou rallier la ligne d’arrivée plus rapidement. Ce que j’aime, c’est le dépassement de soi. Aller à chaque fois chercher plus loin, tout donner, se battre, tout faire pour atteindre son but, accomplir ses rêves, y compris les plus fous. C’est cela que je recherche à chaque fois, qui me fait vibrer, me motive à chaque fois pour m’entraîner autant qu’il le faut, à aller chercher ce supplément d’âme et de force nécessaire. Pour ces moments merveilleux, chargés d’émotions, ces aventures hors du commun, cette impression de vivre pleinement, de faire les choses au maximum, de donner le meilleur. 

Pourquoi ? Parce que c’est ce que je suis, ce que je sais faire le mieux. Parce que je vis pour ça, pour le challenge, le combat. Parce que c’est ce que j’ai toujours fait, me battre, contre tout, contre la vie, les éléments, les difficultés, la fatalité. Parce qu’au final je ne sais rien faire d’autre, j’ai besoin d’objectifs, de quelque chose qui me pousse à avancer. Parce que c’est comme ça que je fonctionne, au défi, à la niaque, à la rage de vaincre. Parce que c’est là que je donne le meilleur, que je suis la meilleure version de moi-même. Inlassablement, envers et contre tout. Parce que c’est là je me révèle et m’exprime le mieux. 

Au fond, la course, le sport, c’est juste un prolongement de la vie, une façon parmi d’autres de montrer ce que l’on est vraiment au fond de nous, au-delà des apparences. D’une certaine manière, le sport me permet d’aller chercher ce combat dont j’ai besoin, d’exprimer cette rage, cette envie de vivre pleinement.

Crédits Photo : Fanny Reyer

L’école de la vie

Au-delà du concours de quéquettes, de la frime sur les réseaux sociaux, de la reconnaissance des autres, des encouragements des amis, de l’admiration parfois, c’est en moi et pour moi que tout cela a le plus d’impact. Parce qu’il faut faire les choses avant tout pour soi, et pas pour les autres.

Ce que le sport m’a apporté, ce que la recherche de la performance, du dépassement de soi, m’a apporté, c’est la discipline, suivre un plan, s’entraîner pour un objectif, parfois lointain. Avoir un but en tête, se lever le matin pour cela, y penser constamment, tout faire pour l’atteindre, ne pas ménager ses efforts. Tout donner, corps et âme, déverser des litres de sueur, se faire mal au cœur et aux muscles. Pour finalement être présent le jour J. Ou parfois pas. Franchir la ligne d’arrivée le sourire aux lèvres. Ou parfois tomber. Se faire mal. Mais toujours repartir au combat. Toujours.

Ce que cela m’a appris, c’est à ne jamais abandonner, lâcher du lest quand c’est nécessaire, mais ne jamais perdre de vue l’objectif. Prendre le temps de se poser, de souffler, de déprimer quand il le faut, prendre le temps qu’il faut pour assimiler, digérer les choses. Mais ensuite se relever, rehausser la tête, et repartir au combat, retourner se battre.

Ce que le sport et la performance m’ont apporté, également, c’est davantage de confiance en moi. Se fixer des objectifs, croire en ses chances, se battre pour les augmenter, tout donner, et atteindre son but. Cela a un impact énorme, considérable, sur l’égo, sur la satisfaction de soi, la confiance. D’abord parce qu’on a atteint ce qu’on s’est fixé. Surtout que mes objectifs sont désormais à un niveau assez élevé et chaque fois plus difficiles à aller chercher. Ce qui me rend d’autant plus fier du chemin parcouru et des performances réalisées. Mais aussi parce que cela prouve tout simplement qu’on est capable, avec des efforts, de l’abnégation, de la ténacité, de tout faire, de tout réaliser, absolument tout, même ce qui semblait autrement impossible. Dans le sport, comme ailleurs.

Au fond, la course, le sport, c’est l’école de la vie. Tu arrives là sans trop savoir comment, tu poursuis un peu hésitant, tu prends confiance en toi, tu te bats, tu persévères, tu ne lâches rien, et tu arrives là où tu ne te serais jamais rêvé. Avec parfois des coups durs, des coups du sort, des blessures, des déceptions, mais aussi des rêves, des joies, des victoires. Comme le disait une fameuse publicité, l’important ce ne sont pas les cartes, c’est de savoir ce que tu en fais.

La pratique du sport forge et révèle le caractère, m’a permis d’endurcir mon mental, de faire preuve de davantage de résilience, d’avoir encore davantage cette rage de vaincre et tout surmonter. D’accepter l’échec comme la réussite, mais de toujours remonter en selle. De se laisser le temps de vivre ses coups de mou, de les accepter, pour mieux rebondir et repartir en piste. D’apprendre à davantage sortir de ma zone de confort à chaque fois, de repousser les limites de ce que je sentais capable, pour aller toujours plus loin. D’oser, de prendre confiance en moi, de rêver, de m’affirmer, et de vivre pleinement.

Le partage pour valeur

Et puis, il n’y a pas que la carotte de la perf’, du chrono ou du défi qui me motivent. Au-delà des questions de chronos à aller chercher, de courses à ajouter au palmarès, il y a avant tout la notion de partage. Et oui, bien qu’assez individuelle, la pratique sportive peut tout aussi bien être collective.

Je cours et roule beaucoup seul. Par commodité, parce que c’est plus simple logistiquement, pour des raisons d’organisation. Mais il faut bien le dire, si je ne faisais que faire du sport seul… Qu’est-ce que ça serait chiant !

Le sport doit pour moi être un vecteur de partage, dans sa pratique, dans ses principes, dans ses valeurs. La pratique de la course m’a permis de rencontrer énormément de monde, de me faire des amis, des connaissances, de partager quelques kilomètres ou une course. De vivre ensemble des victoires, des séances dans le dur, des blocs dans la tempête, des RP,… De mélanger houblon, câlins et sueur dans les after. De nouer des amitiés fortes, de découvrir de belles personnes, de partager des valeurs, de vivre des moments inestimables ensemble. De faire des apéros skype, d’avoir des conversations « what the fuck », de créer des parcours et défis insolites, de se sauter dans les bras, d’arroser tout cela.

Tout cela ne serait pas aussi beau seul, tout simplement. C’est du partage, de ces communautés, de ces amitiés, de ces personnalités insolites que naissent les grands souvenirs. Et c’est aussi des encouragements de ces anonymes, des sourires de ces spectateurs massés sur les trottoirs, de l’ambiance des cris et des applaudissements, que naissent les grands moments de course, ceux qu’on garde encore plus précieusement que les médailles. Sans tout cela, cela vaudrait-il vraiment la peine de se lever aussi tôt un dimanche matin ? Je ne suis pas sûr.

L’amour du voyage et des paysages

Si j’aime autant le sport, et notamment les sports de « déplacement » type course et vélo, c’est que j’aime me balader, voir de nouveaux horizons, bouger.

J’aime le voyage et les paysages, aller découvrir de nouvelles contrées, de nouveaux chemins, partir à l’aventure ou simplement revenir sur les lieux que j’apprécie. J’aime les reliefs escarpés, les récifs des côtes, les champs de blé, les bords de lacs, les monuments prestigieux, les petites églises de quartiers, les villes inconnues, les plages de sable chaud, les ruines de gloires passées, les chemins à demi-effacés, les grands boulevards, les capitales, les petits bourgs, les coteaux de vigne, les sentiers au milieu de nulle part.

J’aime la nature et ses merveilles. J’aime sentir le soleil me brûler la peau, le vent m’ébouriffer les cheveux, entendre le chant des oiseaux, admirer les fleurs et les arbres, regarder les gens qui passent, profiter des points de vues, sentir la terre glisser sous mes chaussures, les cailloux rouler sous mes pas, le crissement de la foulée dans la neige, l’odeur de l’herbe mouillée, les arcs-en-ciel, le tumulte des vagues, la beauté des cimes, le chant des criquets, le danger des pentes abruptes, le mugissement des vaches, les reflets des lueurs sur l’eau, les tapis de feuilles mortes, l’éclat des levers et couchers de soleil.

Courir, pédaler, marcher, c’est une formidable invitation au voyage. De ces périples où tu pars sans trop savoir où aller, ce que tu vas découvrir, mais dont tu reviens les étoiles dans les yeux et des souvenirs plein la tête. C’est prendre le temps de regarder les lieux, profiter de son environnement, prendre des petits chemins de traverse, sortir des sentiers battus, voir les choses sous un autre angle, voir en pleine conscience.

S’évader

Enfin, une autre des raisons pour lesquelles j’aime le sport, c’est que c’est également une invitation à l’évasion. A l’évasion par les paysages bien sûr, mais également intérieurement.

Le sport, c’est aussi aller à la rencontre de soi. Apprendre à mieux se connaitre, prendre du temps pour soi, cohabiter avec son intériorité. C’est laisser filer ses pensées, sans chercher à les retenir, se laisser divaguer, penser librement. C’est un moment de plénitude et de fusion avec soi-même. C’est se sentir libre, extérieurement comme intérieurement.

Quand je cours ou que je pédale, je ne cherche pas à m’imposer à quoi je dois penser. Cela me vient naturellement. Je pense à mon allure, mes sensations, mon environnement, bien entendu. Mais également à ma journée, des événements récents, des personnes, des soucis, des souvenirs, des conversations que j’imagine dans ma tête,… Je laisse aller mes pensées, sans chercher à les contrôler. Je laisse filer, je lâche prise, et ça fait du bien. C’est un moment avec soi-même, pour penser librement, sans contrainte, laisser venir les pensées brutes comme elles viennent.

Après l’effort, je me sens mieux, plus serein, apaisé. Sous l’effet des endorphines bien sûr, meilleur anti-dépresseur au monde. Mais également parce que cela m’a offert un moment de liberté cérébrale totale, qui est si rare dans notre monde aujourd’hui. Cela m’a permis de m’aérer, physiquement, mais aussi l’esprit.

Crédits Photos : Vincent Dheilly – Ilyas Toumlit

Ça m’aide à prendre du recul, mieux resituer les choses dans ma vie, prendre les événements plus positivement, passer à autre chose. Encore l’effet des endorphines bien sûr, mais aussi le fait d’être en mouvement, tourné vers l’action et l’avenir, et non statique. Le sport m’apporte davantage de clairvoyance, de sérénité dans ma vie quotidienne, comme une soupape de sécurité par laquelle évacuer une partie des désagréments quotidiens. 

 

C’est pour l’ensemble de ces raisons que je cours, que je pédale, que je marche, que je fais du sport en général. Il n’y a pas de réponse unique, pas de réponse universelle ou même valable pour tous les jours ou toutes les séances. Ce sont différentes façons, manières, raisons de prendre du plaisir dans ce qui est devenu aujourd’hui un besoin. Pas un besoin primaire, mais sans doute l’un des besoins secondaires les plus essentiels. 

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