Benjamin
5 ans de course à pied, retour sur un parcours fractionné (1/2)
- novembre 9, 2018
- , 3:54
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Aujourd’hui ça fait 5 ans jour pour jour, qu’un beau matin de novembre 2013 je me suis levé plein d’entrain (et sans doute d’inconscience) pour aller courir mon premier footing. Le premier d’une longue série, pas vraiment très continue, avec des hauts et des bas, mais qui allait changer pas mal de choses dans ma vie. Retour sur un voyage de 5 ans dans le monde de la course à pied.
Des débuts de canard boiteux
Certains commencent à courir par envie du challenge, pour s’entrainer pour d’autres sports, pour poursuivre une hygiène de vie sportive acquise depuis l’enfance, pour suivre des potes,… Ce n’est pas mon cas. Non non. Moi avant tout cela j’étais plutôt le bon boulet en sport, pas le sportif que tu vois aujourd’hui poster fièrement ses courses sur facebook et instagram. Le bon premier de classe, bon quand il s’agit de lire un bouquin ou résoudre des équations, mais bien nul quand il s’agissait de shooter dans un ballon. Tu sais, celui qu’on prenait en dernier dans les équipes de sport collectif, celui qui devait rester à l’écart car pas assez bon pour aller jouer à la baballe, celui devant qui le prof d’EPS se désespérait,… Pas de mauvaise volonté, bien au contraire, mais clairement deux pieds gauches et des capacités sportives proches du néant.
Alors non ce n’est pas par amour du sport ou du dépassement que j’en suis venu à enfiler mes baskets, mais plutôt… pour perdre du poids. Deux années de prépa : +3 kilos. 1 an d’école de commerce : + 5 kilos. Ou quand tu vois ton corps se liquéfier peu à peu, ton souffle et ton petit cœur soudainement s’accélérer dès qu’il s’agit de monter un escalier, bref quand tu te vois perdre en tonus et te dégrader peu à peu. A 21 ans, constat sans appel : l’arrêt des séances d’EPS et le cocktail explosif soirées / alcool / malbouffe t’ont fait partir sur une bien mauvaise pente. De celles qui vont être de plus en plus difficiles à remonter au fil des années. Tu te rapproches plus du marshmallow fondu que de la tablette de chocolat mon gars. C’en est trop pour mon orgueil. 21 ans le 7 novembre, c’est décidé, il est temps de repartir sur de bonnes bases. C’est maintenant ou jamais. C’est pas à 40 piges et dans 20 kilos qu’il faudra se réveiller.
Le samedi qui suit, samedi 9 novembre donc, j’enfile des vieilles baskets époque lycée, prend des fringues qui feront pas trop mal office de vêtements de sport, et c’est parti. Direction le parc Montsouris. 1 km pour y aller, quelques tours pour allonger un peu le kilométrage. A vrai dire je ne garde pas énormément de souvenirs de cette séance, si ce n’était que c’était pas de la tarte. J’ai dû faire un truc comme 5 ou 6 kms. Et bien c’était l’une des pires séances que j’ai jamais faite. J’ai eu des courbatures chaque jour de la semaine qui a suivi. Non seulement chaque jour, mais en plus dans des endroits différents à chaque matin, y compris à des muscles dont je ne connaissais même pas l’existence.
Je suis reparti au combat quand même le samedi suivant. Inlassablement, chaque samedi, en essayant d’augmenter un peu les kilomètres de temps en temps. Enfin, inlassablement, pendant quelques mois. C’est un peu comme les bonnes résolutions du 1er janvier. T’es à bloc au début, tu crois que tu vas t’y tenir, rien ne te fera dévier. Et puis en fait, petit à petit s’effectue un glissement dans ta volonté de fer : « non mais j’irai demain… c’est pas grave si j’y vais pas une semaine… pis il fait pas beau aujourd’hui… ». Et ta volonté finit gravement oxydée dans un nouveau mélange soirées-potes-alcool-flemme, plus corrosif que jamais. Retour en école de commerce, 5 mois, +4,5 kilos. Bim. Prends ça dans ta face. Enfin surtout dans ton bide et tes fesses.
Phase 2 : premières courses et premiers plaisirs
Août 2014. Retour à Paris. Finie la vie d’étudiant, rebonjour les levers matinaux pour aller au stage. L’occasion d’un nouveau départ. Pas le temps de réfléchir, de tergiverser, de se dire « oui mais peut-être que… ». Tu prends tes baskets et tu fonces. La motivation est revenue, mais aussi avec elle la peur de lâcher de nouveau.
Alors comment s’assurer de ne pas abandonner ? En allant taper là où ça fait mal quand tu es étudiant. Non je ne te parle pas de la réserve d’alcool ou de pâtes. Le portefeuille. Passage en boutique de sport pour acheter des vraies chaussures de course, des vraies fringues de sport. Un peu comme dans la pub d’Intersport où la fille commence à vraiment s’y mettre après avoir fait quelques emplettes. Bon moi y’avait pas de crush après qui courir par contre. On fait ce qu’on peut hein. Alors j’ai suivi le conseil d’une amie : j’ai pris un dossard. Alors que je devais plafonner à 10 kms, je me suis inscrit à ma première course : le semi-marathon de Paris en mars 2015. Quelques billets en moins, ça te donne une motivation pour te dire que t’as pas envie de les lâcher pour rien.
Ça n’a pas trop mal marché ce petit truc. Semaine après semaine, chaque samedi je partais faire le hamster dans le parc Montsouris. Je ne sais pas trop si j’aimais particulièrement ça, mais je m’y tenais. Une séance par semaine, en augmentant progressivement le kilométrage. Jusqu’à un mois avant le semi. Sinusite pendant 3 semaines, panne sèche, arrêt au stand. Et pourtant je l’ai couru ce semi-marathon, tranquillement, à mon rythme, ma première course. Et j’ai a-do-ré !
Problème, n’ayant plus d’objectif après ça, j’ai un peu végété et déprimé. 2 semaines pour récupérer sereinement de la course (cette blague aujourd’hui quand je regarde en arrière), et bien du mal à retrouver l’envie sans la carotte au bout de la route. Alors j’ai cherché, et trouvé une course un peu plus longue. Je suis retourné à l’entrainement, ai commencé à monter à deux séances par semaine, prenant de plus en plus goût et plaisir à ça. Quant à la course en question : une horreur, sous un soleil à 30°, pas assez d’eau aux ravitaillements, un final au mental. Mais là encore j’ai adoré, et en plus j’avais fini avec un chrono plutôt satisfaisant. Oui parce qu’en plus je commençais à me rendre compte que le guignol que j’étais et qui essayait tant bien que mal de mettre un pied devant l’autre pas trop lentement ne s’en sortait pas si mal.
Du plaisir et des temps pas dégueu donc. On commence à être sur de bonnes bases. Je crois que je commence à vraiment aimer ça. Si si, pour de vrai. Pas vraiment ce qui était prévu, mais bon. Petit à petit les questions existentielles de kilos à perdre ont laissé la place à la recherche de l’exaltation de la course, du dépassement, de nouveaux challenges et horizons à aller chercher. C’est fou hein ? Oui je sais que vous vous dites que c’est totalement débile même.
Alors, que faire maintenant ? Et bien après cela, en termes de distance, il ne reste souvent qu’une distance à aller chercher. La distance reine : le marathon. Le truc de maboule que jamais, tu m’entends jamais, je ne pourrai faire. Le rêve d’une vie, totalement inaccessible. Et pourtant. Je me fixe un objectif : si je suis capable de courir 25 kms d’affilé, je m’inscris… 1er Septembre 2015 : inscription faite, rendez-vous est donné à Paris pour avril 2016.
Entre temps beaucoup de choses se passent : un échange universitaire aux USA, de la malbouffe à volonté à tous les repas, mais aussi beaucoup de sport, que ce soit sur la piste ou dans la salle de sport du campus, pour éliminer les cookies, mozza sticks et cheesecakes option coulis fruits rouges. Des camarades de course rencontrés sur place aussi, avec qui je me suis inscrit pour courir en même temps ce premier marathon. Avec qui aussi j’aurais tenté cet incroyable concours de quéquettes qui arrive inévitablement quand tu laisses des mecs courir ensemble : 10 kms courus sur piste, à qui finit le plus vite. 25 tours de pistes, et un 10 kms fini en 40 min. Stratosphérique, le genre de performance qui te fait te rendre compte qu’on commence à atteindre un niveau vraiment pas déconnant finalement.
Premier marathon, début des choses sérieuses
Jusque-là c’était bien gentil tout ça, mignon tout plein, mais pas bien sérieux ni structuré. Retour en France, et donc un soir de janvier je me pose très sérieusement la question suivante : « Et sinon, ça se prépare comment un marathon ? ». Ah, il faut faire une préparation sur 12 semaines ? Ah donc en fait il faut commencer cette semaine. Ah, il faut courir 3 fois par semaine et 40 kms minimum par semaine. Bon, bah quand il faut y aller, il faut y aller. Amateurisme. Total. Un guignol je vous l’avais dit.
S’ensuit une prépa faite globalement sans grande structure, avec un seul fractionné (j’ai pas aimé alors j’en ai plus refait, tout simplement), improvisée, avec pour seuls impératifs de courir 3 fois par semaine et allonger les séances longues. Prépa longue, fatiguante, où j’en ai marre sur la fin, et que je finis avec un genou en vrac. Mais pourtant terriblement géniale en cela qu’elle structure ma vie, me donne une raison de me lever le matin, me motive chaque fois. Je me lève, je pense marathon ; je bosse, je pense marathon ; je vais me coucher, je pense marathon. Cela m’obsède, pas une journée sans que je ne pense à cela, que je coure ou pas. C’est certainement là que tout s’est joué, que le décrochage s’est fait, que le basculement s’est effectué vers une vie axée sur la course à pied. Cette structure, cette motivation, cette envie que cela te donne pour atteindre un objectif supérieur, pour aller te dépasser et aller décrocher un rêve, c’est cela que j’aime, que je veux continuer à faire.
Arrive le jour J, dimanche 10 avril 2016. Le premier jour du reste de ta vie comme diraient certains slogans hollywoodiens un peu pompeux. Et c’était juste géniaaaal ! Extraordinaire, magique, grandiose, explosion d’émotions. De la joie, de l’excitation, de la fatigue, de la douleur aussi, mais surtout une immense fierté à la fin. Tu passes de « Mais quelle idée de merde, pourquoi je me suis lancé là-dedans ? » en fin de course, à « Quand est-ce qu’on recommence ? » quelques heures plus tard. Une bouffée d’oxygène, un rail d’héroïne, un combat solitaire, un face-à-face de vérité avec soi-même, une myriade d’instants qui mis ensemble font un arc-en-ciel de bonheur, il y a pas de mots pour décrire ces 3h47 qui font ressentir tant de choses physiquement et émotionnellement, un concentré de vie.
Piquouzé, je m’inscris dès le lendemain pour le marathon de l’année suivante. Pourtant, c’est une année en dents de scie qui m’attend jusque-là.
Suite à lire dans le second article ici.
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