Médailles Marathon

Pourquoi un tel engouement autour du marathon ?

Dans un mois, je m’élancerai de nouveau vers ce qui sera mon 6e marathon. Après une 6e préparation,  après de longues semaines au kilométrage intensif, aux levers aux aurores, aux tours de piste à ne plus pouvoir les compter, aux sorties qui te fracassent les jambes, aux blocs de vitesse de te font crier le cœur et les poumons. Après de longues semaines passées à abreuver mon fil Instagram et mes storys de séances savamment orchestrées selon un plan et avec un vocabulaire obscur que très clairement aucun de mes amis ne comprend. Après des propositions de soirées refusées, parce que tu comprends j’ai une séance de fractionné ce soir. Après deux dernières semaines durant lesquelles tout excès de gras et d’alcool sera proscrit, en même temps que ma vie sociale en prendra un coup. Que veux-tu, c’est quand même plus compliqué de sortir quand ta boisson fétiche est désormais le perrier citron, et que la salade te paraît être un bien meilleur choix que la pizza. Oui je sais, ça paraît pas particulièrement folichon tout cela dit comme ça, mais si là tout de suite tu ne comprends pas pourquoi retourner s’infliger cela à chaque fois, la suite est pour toi.

 

Un marathon, c’est un éternel recommencement, à chaque fois une nouvelle préparation, de nouveaux doutes, de nouveaux rêves, une nouvelle aventure. 42,195 kms, la distance reine. Oui, mais alors, pourquoi? Pourquoi cet attrait ? Qu’est ce qui fait de cette course quelque chose de si particulier au point qu’on y retourne à chaque fois ?

Quand je parle de la difficulté du marathon, de son exigence, de ses contraintes en entraînement, les gens ne comprennent pas, bien sûr, froncent les sourcils, un air interrogatif dans le regard : « Mais pour toi c’est facile ça, tu l’as déjà fait plusieurs fois. »

Oui. 5 fois même. Mais non. Non ce n’est pas facile. Non, un marathon ce n’est jamais facile, peu importe l’expérience.

Le mythe du marathonien

Un marathon tout d’abord c’est un mur. Le fameux mur du marathon bien sûr. Mais aussi plus simplement un mur en ce qu’il représente l’objectif suprême pour tout coureur. 42,195 kms. Pas un de plus, pas un de moins. Le grâal. La distance dont on rêve tous. Un peu comme un objectif de vie, indépassable, un point qui marquerait un cap dans la vie du runner. A tel point que l’agitation sur les réseaux sociaux autour de la distance reine peut parfois donner l’impression qu’on ne pourrait être un coureur accompli si on ne s’est pas risqué et piqué à cet Everest de la course. A tort, et avec toutes les dérives que cela engendre : manque de préparation, blessures,… Le marathon c’est donc cette distance qui fait rêver, qui donne des étoiles dans les yeux, qui pousse à se dépasser et à s’entraîner pour aller franchir cette fameuse ligne d’arrivée, et pouvoir se dire enfin marathonien.

Un éternel recommencement

Pourtant, même après s’être frotté au marathon, le respect pour la distance, l’émerveillement, la peur, les craintes demeurent. 42,195 kms, ça ne reste pas rien, pour tout coureur, quel que soit son niveau, son expérience. Repartir sur un marathon, c’est recommencer à zéro. Affronter à nouveau une nouvelle préparation, avec ses contraintes, ses sacrifices, mais aussi ses joies. C’est accepter de se remettre en question: Suis-je à nouveau capable de cela ? Vais-je atteindre mon objectif ? Repartir sur un marathon, c’est être capable de se jauger, de juger ses progrès, d’aller chercher plus haut, plus vite surtout. C’est s’aventurer sur un nouveau chemin, retourner au combat pour atteindre son objectif, ses rêves.

Car c’est bien de cela qu’il s’agit : d’un combat. Un marathon c’est dur, physiquement et mentalement. C’est un combat, contre la distance, contre le chrono, mais aussi et surtout contre soi-même. C’est aller se mesurer à sa volonté, à ses capacités, à ses envies, à sa niaque. C’est repartir dans l’arène, vers le succès ou l’échec. Parce que c’est en de pareilles circonstances qu’on essaie toujours de donner le meilleur de soi-même, parce qu’on espère se surprendre, parce qu’on a peur de se décevoir, le marathon reste un enjeu de taille. Un challenge à la mesure de sa difficulté.

Chaque marathon est différent

Un marathon, c’est de la peur et de l’excitation, c’est être pris d’un vertige, face au défi et à sa difficulté. Car non, courir un marathon ce n’est jamais facile. Parce que courir une telle distance, c’est à chaque fois aller au-devant de l’inconnu. C’est la seule distance où, peu importe la préparation, on se sait vulnérable à tout un tas d’imprévus. C’est un saut dans l’inconnu en quelque sorte, l’inconnu que représente les 10 derniers kilomètres. On peut être aussi préparé qu’on le veut, et malgré tout rencontrer un soucis, être en difficulté. Rien n’est jamais gagné, car franchir le 30e kilomètre, c’est à chaque fois s’aventurer sur un terrain non balisé à l’entraînement. La préparation aura été là pour nous éviter toute mauvaise surprise, mais qui sait ce qu’il peut véritablement advenir le jour J. Que ce soit la météo, des problèmes digestifs, la forme des mauvais jours, un mauvais rythme au départ, le moindre paramètre peut déranger un succès tant espéré. C’est dur, ça peut être injuste. Mais c’est justement ce côté aléatoire, cette incertitude, ce doute permanent, qui fait de cette course quelque chose de magique, de particulier, d’insaisissable, d’unique à chaque fois.

Marathons

Grâce à cela, aux différents objectifs fixés et qui évoluent au fur et à mesure, aucun marathon ne ressemblera à un autre. Et de la même sorte aucune préparation à une autre.

La préparation, un long chemin de renforcement mental et physique

Ah, la préparation. Courir 42,195 kms un dimanche matin, le tout pour revenir au même point que le départ, ta famille et tes amis ont déjà bien du mal à comprendre quelle mouche a bien pu te piquer. Mais en plus aller s’enfiler 8 à 12 semaines d’entraînements intensifs avant cela, à base de mots barbares comme fractionné, fartlek ou encore warm up, non mais là on frôle limite la psychiatrie. Un runner en préparation marathon, c’est un mec (ou une nana) qui se dit que ça serait une bonne idée d’aller s’enfiler à vive allure des tours de piste chiants à mourir tout en crachant ses poumons, ou encore de se coucher tôt un samedi soir pour partir tôt le lendemain matin faire sa sortie longue, comprendre entre 25 à 32 kms, et ce qu’il fasse beau, qu’il pleuve ou qu’il neige. Pas un peu fou celui-là ?

Bien sûr, ton ami runner te répondra que non, il va très bien, merci pour lui. Très bien même, il ne s’est jamais senti aussi bien (à part qu’il a un peu mal aux jambes quand même).

Une préparation marathon, c’est courir 3 à 6 séances par semaine globalement, et donc espérer que son emploi du temps soit un gruyère où caser ses entraînements dans les trous. Ça peut paraître fou, mais ça structure la vie. Plusieurs fois par semaine, tu cours, et donc tu organises ta semaine en fonction de cela. Et même les jours où tu ne cours pas, et bien tu penses à cela. Tu te lèves le matin, tu penses marathon; tu manges, tu penses marathon; tu te couches le soir, tu penses marathon. C’est bien simple, tu y penses tout le temps. Ça peut paraître dingue (on en revient à la psychiatrie n’est-ce pas ?), c’est tout un mode de vie qui se met en place, plus sain, plus organisé, tout entier dirigé vers un objectif, un but sur le moyen-terme. Et quoi de plus beau, de plus passionnant, de plus motivant que d’être animé par un objectif si dévorant, si prenant ?

A chaque fois, c’est une nouvelle tranche de vie durant ces quelques semaines, avec un début, une fin prévue, des moments de joie, de doutes, de moins bien. C’est une parenthèse dans ton année sportive, une parenthèse tellement riche en progrès et en apprentissages. Ce sont quelques semaines où tu t’amélioreras bien sûr, mais où surtout tu te testeras, tu apprendras tant sur toi-même, ta volonté et ton corps. Ce sont des dizaines de séances qui vont te permettent de te renforcer, de te préparer à l’effort du jour J, de prendre confiance en tes capacités physiques et mentales. C’est le moment de muscler son jeu, comme dirait un célèbre entraîneur. C’est à chaque fois un nouveau voyage, une nouvelle aventure, où tu viens prendre le meilleur des anciennes préparations, enlever le moins bon, pour reconstruire un nouveau programme, en adaptation permanente. Alors, cette préparation n’est pas juste une douce dinguerie, mais le chemin pour arriver à destination, et souvent ce chemin peut être plus riche et plus beau que la destination finale elle-même.

Marathon Berlin

Vous l’aurez compris, j’adore cette distance. Pourtant, elle, elle ne m’aura pas toujours bien aimé, et j’ai connu des fortunes diverses sur les expériences déjà accumulées. Mais j’y reviens à chaque fois, car elle a pour moi cette essence si particulière, unique, volatile, imprévisible, magique. Replonger dans le chaudron du marathon, c’est à chaque fois une nouvelle aventure, avec ses doutes, ses joies et ses risques. Mais une chose est sure, des aventures de ce genre, il y en aura encore un paquet.

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