Benjamin
The Speed Project : 31h15 de fractionné et de kinder
- septembre 26, 2020
- , 10:53
- , Running
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Un concept loufoque
Il est des idées folles qui tombent parfois de nulle part. Vous courrez tranquillement, sortez votre téléphone pour prendre une photo, et tombez sur un appel à candidature pour un défi loufoque. 31h15 de relai, à 8 coureurs, avec pour but de faire le plus de kilomètres possible. Pas plus d’indications. Vous rangez votre téléphone. Mais vous savez déjà qu’il n’y a pas besoin de réfléchir : vous voulez le faire. « Ça a l’air sacrément débile, on signe où ? ». Vos jambes vous haïssent déjà.
Alors, qu’est-ce que c’est encore que cette idée à la con ? Quésako ça le TSP ? Le TSP c’est The Speed Project, des gens aussi sains d’esprit que moi (c’est vous dire) qui sont partis entre potes faire Los Angeles-Las Vegas le plus vite possible en courant. On occupe ses week-ends comme on peut. Et puis comme ça avait l’air marrant, du moins selon certains standards, ils se sont dit qu’ils pouvaient trouver d’autres énergumènes que ça tenterait. Oui oui, parce qu’il y a plein de gens qui aiment ça, faut pas croire.
Problème, comme 2020 a décidé d’être une année assez beaucoup passionnément pourrie, la course est devenue compliquée à organiser. Alors, pourquoi pas le faire de manière virtuelle, en demandant à des équipes de faire le plus de distance possible en 31h15, soit le record de cette petite folie. Voilà, vous avez le topo.
Ensuite, Adidas a dit : top là, on va faire courir plein de coureurs dans le monde entier, ça va les occuper. Surtout à Paris, parce qu’ils aiment bien dire que leur quartier court plus et mieux que les autres. Et paf, ça donne des Choca… Ah non une course débile. Avec 8 coureurs par équipe, 4 mecs, 4 filles, prêts à défendre leur quartier, au détriment de leurs cuissots et de leur système intestinal.
Préparation à l’arrache
Une fois sélectionné, il a fallu commencer à se poser quand même quelques questions essentielles, du genre « Comment je prépare ça » (ça je vais l’expliquer) ou « Pourquoi je fais ça ? » (ça on aura jamais la réponse en revanche).
Petit soucis : on est prévenus de l’imminence de cette petite sauterie 4 semaines avant. Vos jambes vous en veulent encore plus à ce moment.
Vu la distance prévisible à parcourir, il faut arriver frais. Donc ralentir le rythme les deux dernières semaines pour être prêt à tout casser, sauf vos genoux si possible. Il reste donc deux semaines pour préparer ça. Aie. Double aie. Va pas falloir chômer.
A date, le niveau est pas dégueulasse, mais pas incroyable non plus. De quoi s’amuser, mais niveau performance, on est loin, très loin du début d’année. La faute à un confinement, la flemme de retourner au frac, l’absence de course. Et puis parce qu’en ce moment, il n’y a pas forcément de bien à se faire du mal, paraît-il.
L’événement tombe donc à point pour relancer un mental un peu lassé de l’absence de perspectives et de défis.
Puisque le temps est compté, j’ai divisé ces 2 semaines en 4 temps, guidé par l’objectif de refaire beaucoup de volume, et remettre un peu de vitesse. Le but ? Créer un choc, une sur-activité pour sortir de la zone de confort, créer des conditions obligeant le corps à s’adapter et évoluer, pour progresser et être prêt à encaisser ce qui l’attend.
- Début de première semaine : pas mal de volume pour installer une pré-fatigue et borner
- Fin de première semaine : remettre davantage de vitesse, sur la fatigue qui s’est installée en début de semaine
- Début de seconde semaine : à nouveau pas mal de volume en un temps court pour sortir le corps de sa zone de confort, avec notamment un défi un peu violent
- Fin de seconde semaine : bon là on fait avec ce qu’il reste dans les jambes.
Et ça s’est plutôt pas mal passé. Notamment parce que le mental était regonflé à bloc. Avec une envie que je n’avais pas connu depuis un bon moment. Séance après séance.
Première semaine nickel, 135 kilomètres au compteur, une bonne fatigue mais de bonnes réponses sensorielles. La seconde semaine a été marquée très rapidement par un défi un peu costaud. Faire l’aller-retour au boulot dans la journée en courant, soit au total 53 kms. Faire beaucoup de bornes en gérant la fatigue, et relever un défi que je n’étais fixé depuis un moment (il était temps : 3 jours avant le changement de boulot !). La faute aussi à deux potes qui se sont innocemment dit qu’ils pouvaient me défier de le faire en blaguant. Mauvaise idée. Ça rigole moins maintenant hein ?
Autant ce challenge singulier s’est plutôt bien passé, malgré quelques signes de fatigue physique et mentale sur la fin. Autant la récupération a été compliquée. Comme prévu, le reste de la semaine s’est fait sur un petit état de forme après cet effort inhabituel. Jambes sciées. Cardio en rade. Impression de ne pas avancer. Corps à la peine. Borner, toujours, mais dans la difficulté.
Vient ensuite le temps de l’affûtage, 2 semaines de réduction de volume pour arriver frais le jour J. Clairement, je ne me suis pas foulé et j’ai appliqué une recette que je savais marcher : même volume et mêmes séances que lors de mes dernières préparations marathon globalement. Ça avait plutôt bien marché. Et ça a de nouveau bien marché. Un beau pic de forme qui se dessine à l’horizon pour ce weekend titanesque, voilà de quoi mettre en confiance.
Bref, je suis arrivé serein, confiant en mes capacités et certain d’avoir fait au mieux durant ces 4 courtes semaines. En m’amusant, le plus important.
Début des hostilités
Samedi 5 Septembre 2020. De nouveau ces sensations qui avaient tant manqué. Le petit stress d’avant-course. Les préparatifs. Le plat de pâtes à 10h du matin. Vérifier 15 fois qu’on a bien tout pris dans son sac. Partir à la minute près de chez soi, et arriver en avance. Rah ça fait du bien.
12h. On se rejoint au compte-gouttes avec mes camarades tout aussi cinglés d’avoir postulé à ce weekend pour masos endurcis. Une belle équipe aux profils très différents, mais tous avec pas mal de kilomètres au compteur et de beaux exploits au palmarès. Et en plus ils sont tous adeptes du « courir plus pour manger plus ». Ça présage un beau week-end.
Crédits photo : Matt Colange
Les membres de l’organisation et les accompagnants nous rejoignent peu à peu. Amenant avec eux foule de victuailles pour satisfaire nos estomacs, et surtout notre gourmandise. C’est une logistique extraordinaire qui se met en place, avec l’installation… d’un campement. Oui oui. Un vrai campement, en plein bois de Vincennes, dans Paris, avec tentes individuelles, bonbonnes d’eau personnelles, tapis de sol, tente de ravitaillement, responsables de camp, et même, grand luxe, une table de massage. Comme quoi on peut être dépaysés à quelques kilomètres de chez soi. 5 étoiles sur TripAdvisor.
Pendant que toute cette incroyable énergie se démène pour nous faciliter la vie et nous chouchouter, nous nous positionnons sur le parcours de départ. Ce qui va être notre paradis et notre enfer pour une bonne partie de ces 31h15. Le lac de Gravelle. A tourner, encore et encore.
Niveau stratégie, nous nous sommes divisés en deux sous-équipes de 4, en tournant par blocs horaires de 1h à 2h. Ce qui garantit à chacun des temps de pause relativement longs, pour reposer les jambes et avoir le temps de prendre des repas plus ou moins consistants. Au sein de chaque bloc, plusieurs répétitions de temps différents, en enchaînant les uns après les autres à la fin de chaque répétition horaire. Ainsi, nous allons partir pour ce samedi, pour chaque sous-équipe, sur :
– 2 heures de répétitions de 4 minutes
– 2 heures de répétitions de 3 minutes
– 1 heure de répétitions de 2 minutes
Avant d’enchaîner ensuite sur la partie « nuit ».
Crédits photo : Matt Colange
L’équipe A, composée de Adèle, Oriane, Thomas et Florian, va inaugurer la danse. Top départ à 13h. C’est parti pour 31h15 durant lesquelles nous allons tous nous relayer, et ne jamais nous voir à 8 en même temps.
Pendant que l’équipe A court, nous en profitons, l’équipe B composée de Montaine, Marion, Adrien et moi-même, pour nous reposer et aller chercher de quoi nous ravitailler.
Puis, à 15h, c’est à notre tour de nous lancer dans l’aventure. 7 répétitions de 4 minutes chacun, et 2 répétitions supplémentaires à se répartir sur la fin. Et ça part vite. Très vite. Trop vite semble-t-il. Des allures folles, dopées par l’adrénaline, l’envie de tout donner, l’euphorie, les jambes fraîches.
Une première répétition en 3’15 d’allure moyenne. Puis une autre. Et encore une autre. Le tout rythmé par les coups de sifflet d’Edouard le nouveau prof d’EPS tendance de Gravelle. Et au final ça tient jusqu’au bout. Avec option ravito bonbons ravito de temps en temps pour reprendre des forces. Un élément indispensable de notre stratégie alimentation.
Vous avez compris la logique, c’est ensuite l’équipe A qui prend le relai deux heures plus tard. Après un beau fractionné de 8x1200m à une allure à laquelle je cours habituellement mes 1000m. Violent. Je me sens un peu séché quand même. Ça a pompé dans les réserves d’énergie, il faut réalimenter la machine pour éviter la panne. Et quoi de mieux pour cela que notre chef de camp et maman du weekend Mofida. « Tu veux manger quoi ? ». Une phrase anodine et pourtant terriblement compliquée à répondre. Du genre t’es capable de rendre copie blanche après 4 heures de réflexion.
Crédits photo : Thomas Verger
Après un bon ravitaillement de riz, jus de raisins et noix de cajou (« mettez leur la tonne de sel dans leur bouffe ! »), c’est reparti pour le bloc suivant, les 3 minutes. Plus facilement à tenir physiquement, mais plus de répétitions, et donc potentiellement plus de fatigue mentale.
Je ralentis l’allure pour me caler sur 3’25-3’30 au kilomètre, et ça passe beaucoup mieux. Répétition après répétition, une par une. Avec le leitmotiv dans la tête « Ce qui est fait n’est plus à faire. Une de plus. » Ça tient aussi plutôt bien chez mes camarades, qui continuent à enchaîner de belles allures. Et nous avons la chance et le plaisir depuis le début d’être régulièrement accompagnés par des supporters cyclistes sur nos tours. Pour nous motiver et assurer une présence morale qui fait tellement de bien au mental. Et avec notre supporter numéro 1 : le héron du lac.
Crédits photo : Matt Colange
Pause d’une heure, un nouveau ravitaillement solide à base de patate douce (salée), et c’est reparti pour une heure de répétitions de 2 minutes. Il fait sombre désormais, et les frontales ne sont pas de trop pour ne pas finir dans le lac. Et dire qu’il y a quand même des gens bizarres qui passent leur samedi soir à tourner en rond. Il faut de tout pour faire un monde, n’est-ce pas ?
Nuit de l’enfer au Bois de Vincennes
Voilà terminé la partie « jour » de ce samedi, nous passons désormais à la partie « nuit ». Cette fois-ci, nous allons tourner par binôme. 2×30 minutes chacun, avec roulement de binôme toutes les 2 heures. De quoi assurer à tous de bonnes plages sans courir pour dormir un peu. Sur un circuit différent cette fois-ci, long de 1,7 kms, dans le bois et sur l’Avenue de Gravelle. C’est Montaine qui se charge d’enchaîner sur la première répétition de 30 minutes directement après nos 2 minutes. Pendant ce temps-là, j’en profite pour aller me chercher un peu à manger et mettre une veste. C’est qu’il commence à faire sacrément frais.
A 23h30, c’est à mon tour de me lancer. Les jambes tirent un peu, sont fatiguées, mais toujours à même de tourner à bon rythme. Du moins c’est ce que je crois. C’était sans compter sur un adversaire inattendu : la montre. Incapable de capter le GPS dans le bois, elle m’affiche des allures totalement déconnantes. Je veux bien que je sois fatigué, mais je ne suis pas non plus en 4’30 il faut pas déconner ! Non mais ô. Bon en vrai je faisais un peu la gueule.
J’ai donc couru à la sensation faute de mieux. Mais avec des sensations un peu trompées par les kilomètres déjà accumulés, et surtout l’allure à laquelle ceux-ci ont été parcourus. En gros : j’ai couru comme un bourrin. Et je l’ai senti passer. La fin de ces 30 minutes a été un peu difficile, alors que ce genre de bloc un peu plus long devrait normalement être mon point fort. Les encouragements enthousiastes de mes accompagnants vélo, notamment de Julie, n’auront pas été de trop pour me motiver à tenir.
Enfin, le compteur affiche les 30 minutes et je peux m’arrêter. La montre affiche une allure moyenne à 4’03, tandis que le compteur de Julie affiche une vitesse bien plus élevée, d’un kilomètre heure plus rapide. En ligne avec mes sensations. Foutu GPS. Sale histoire.
Montaine prend le relai pour son second 30 minutes. Et c’est là que je réalise que ça va être très compliqué. Je suis séché. Enfin, façon de parler. Je suis plutôt trempé de sueur dans ma veste… et rapidement frissonnant. Je prends l’eau et la nourriture que les supporters me tendent pour me redonner des forces. Je m’assois par terre et on me recouvre d’un plaid et d’un sac de couchage pour me tenir chaud. Je n’ai plus qu’un petit bout du visage qui émerge tellement les copains ont voulu me tenir chaud. Quelle nuit !
Mais, fatigue ou pas, il y a un moment où il faut repartir. Même quand on ne veut pas. Mais alors vraiment pas. Je sens que ça va être dur. Mais je me relance dans la course, pour un second 30 minutes qui va s’avérer très difficile. Clairement, les jambes n’ont plus envie. Le corps est fatigué, plus d’énergie, froid. L’ambiance est très particulière, à tourner en rond dans le noir, même si heureusement je suis accompagné de mes supers supportrices qui me donnent la force de continuer foulée après foulée. Nous croisons de temps en temps quelques personnes égarées cherchant une fête, ou autre chose. La nuit est sombre et pleine de terreurs.
Moi qui me suis habitué depuis longtemps à tenir de longs blocs au mental sur la fin de mes sorties longues, j’ai l’impression d’être en plein dedans. Le corps ne suit plus vraiment, c’est clairement la tête qui fait tenir le tout désormais. Je ne parle plus beaucoup, comptant les tours, les minutes jusqu’à la délivrance. Un enfer.
Mais, comme à chaque sortie longue, le mental, ainsi que les encouragements tellement bienvenus de mes accompagnatrices, me permettent d’aller au bout de mon effort. Rincé physiquement. A bout d’énergie. Mais j’ai réussi à garder une allure relativement bonne (4’07) au vu de mon état physique du moment.
Une fois arrêté, je ne pense qu’à une chose : instinct de survie, manger ! Reprendre des forces, se réalimenter, éviter l’hypoglycémie, reposer le corps.
Retour au camp. Je me lave avec des lingettes afin de pouvoir enfiler des vêtements propres. Un plaisir simple, mais qui fait du bien. Juste avant d’enfin me réalimenter d’un mélange patate douce noix de cajou compote qui n’a aucun sens, mais on s’en fout un peu (« Tu veux quoi ? Montaine a demandé de la compote » « Oh ouais trop bien ça »). Pendant que Maman Mofida s’occupe parfaitement de moi en me massant les mollets endoloris.
Je me couche, il est 1h40. Pour retourner courir à 7h. La nuit n’est toutefois pas aussi reposante que je le souhaiterais. Une longue alternance de siestes. Dormir 20 minutes. Se réveiller. Se rendormir. Se réveiller… Tout cela rythmé par le doux son des basses de la rave party toute proche dans le bois. Oui oui. Il s’en passe vraiment des choses la nuit par ici. Bonheur.
Repartir pour un (des) tour(s)
Ces 5h allongé ont toutefois au moins le mérite de reposer les jambes, qui en avaient bien besoin. Quand j’entends ma voisine de tente se lever à 6h30 et décide de l’imiter, l’état des guibolles n’a plus rien à voir avec la forme d’avant dodo. Avant de me coucher, je me demandais bien comment j’allais faire pour repartir le lendemain. Mais c’est désormais un autre jour qui commence, et le corps semble prêt à repartir de zéro (enfin presque).
Un petit-déjeuner au Kinder avalé vite fait, histoire de ne pas repartir à jeun, et il est temps de ressortir de notre campement 5 étoiles pour retourner au combat. Car il faut bien avouer que, mentalement, c’est bien un combat de se remotiver au vu de tout ce qui nous attend encore. Mais une chose à la fois.
Nous commençons la journée par un premier bloc de 10 minutes chacun notre tour, puis un second bloc de 5 minutes. Belle manière de commencer son dimanche matin, n’est ce pas ? Quoi, vous ne faites pas cela vous à 7h du matin ?
Les jambes repartent bien, plutôt en forme, l’allure est bonne, les sensations satisfaisantes. Tout semble de nouveau rouler. Soulagement. Une belle allure de reprise à 3’51 de moyenne sur les 10 minutes. Puis 3’37 sur les 5 minutes. La machine est relancée. Et il n’est plus question de l’arrêter.
Crédits photo : Fanny Reyer
Nouvelle pause alimentation pendant une heure, et on repart sur un bloc de 1h30 de répétitions de 4 minutes. Autant dire qu’un dimanche à 9h du matin, le lac de Gravelle est étrangement calme. Nous sommes peu nombreux au début, mais nos fidèles organisateurs sont toujours là pour veiller sur nous. David, puis Édouard et Fanny qui reviennent après une courte nuit. Incroyable de voir tous ces gens nous supporter, chouchouter, accompagner, guider, tout au long de ce weekend, dormant peu, enchaînant les tours avec nous, pour nous aider au mieux dans notre tâche. Ils doivent être un peu masos aussi au final.
Alors que l’équipe A vient reprendre le relai sur les coups de 10h30 (je donne les heures après coup, parce qu’en vrai je ne savais plus où j’en étais dans ma vie à ce moment-là), nous repartons faire un énième aller-retour vers le camp pour nous sustenter. Et, à mesure qu’on approchait de plus en plus de la fin, basculer dans le grand n’importe quoi alimentaire. Des noix de cajou avec du poulet, de la patate douce avec des bonbons, avec pour point d’orgue le péché mignon : le saucisson. Fun fact : la seule chose que l’organisation a dû aller racheter car nous avions tout dévalisé sont… les Kinder. Mention spéciale au combo improbable Melon Kinder d’Adrien. Vous ne verrez plus jamais les coureurs de la même façon après ça.
Crédits photo : Fanny Reyer
Après cet intermède de grande gastronomie, retour à la course. Les moments bouffe étaient, il est vrai, bien plus fun. Mais c’est comme le boulot : t’as pas envie de te lever mais tu sais qu’il faut y aller.
Et ça continue encore et encore
Et c’est reparti pour 2 heures de répétitions de 3 minutes. Soit 10 fois. La fracture du mental. Je sais qu’à ce moment tu commences à en avoir marre, lecteur, de ce lent égrenage de blocs de courses tous plus douloureux les uns que les autres. Alors imagine nous qui l’avons vécu. Ces 31h15 étaient à la fois longs, et rapides. Je sais plus trop en fait. Il paraît que le cerveau fait oublier les moments douloureux. Ça doit être pour ça que j’ai trouvé ça cool. Donc non ce n’est pas de la folie, juste un processus biologique cérébral. Enfin je crois. J’espère.
Je commence à ressentir des premières douleurs dans la cuisse lors des départs de répétitions, mais rien d’alarmant à ce stade. Le corps tient. Debout. Et assis pendant les pauses aussi.
Rebelote nouvelle pause ravito n’importe quoi. Repos nécessaire, mérité, indispensable. Et ça repart. Avec une motivation incroyable. Mais à qui vais-je faire croire ça ?
Crédits photo : Fanny Reyer
Mais on approche peu à peu de la fin. Avec ces 11 fois 2 minutes qui piquent. On change de lieu de départ pour commencer par une légère descente. Ce qui semble bénéficier à mes camarades. Mais achève de me démolir la cuisse. Celle-ci me fait désormais bien mal à chaque départ. Je ralentis donc l’allure sur cette mini-descente pour éviter de taper trop violemment au sol, puis accélère sur du plat plus sympathique pour mes bobos. Mais c’est dur. Ça a beau n’être que 2 minutes à chaque fois, ça tire. Les supporters sont de plus en plus nombreux à mesure que le final se rapproche, nous offrant encouragements et massages pour nous aider à tenir.
Après une dernière pause Kinder, nous nous positionnons pour le tout dernier bloc. Après tant de temps autour du lac de Gravelle, nous prenons nos quartiers en haut de la côte du Polygone. Histoire de profiter de la descente pour l’étape finale. Au programme de ces dernières 1h15, des 1 minutes à fond, cette fois-ci tous ensemble à 8 pour la première fois. Enfin presque, Oriane étant malheureusement blessée au pied durant la dernière heure de course.
Crédits photo : Fanny Reyer / Yovhanna Billard
Autant dire que ça s’enchaînait très vite. Un accompagnant vélo pour rouler avec nous dans la descente, et nous laisser le vélo pour remonter plus vite. Relai grande vitesse garantie. Sous les encouragements des supporters toujours plus nombreux qui se sont répartis le long de la descente pour nous hurler dessus. Extraordinaire ambiance digne d’un tour de France.
Après quelques difficultés pour relancer les jambes sur les premières répétitions, la vitesse revient et permet de repartir sur une très belle allure de 2’55-3’00 au kilomètre. En revanche que c’est dur de tenir les 60 secondes à une telle vitesse, ça fait mal au cardio bordel. Je crois bien avoir prononcé à la fin de plusieurs répétitions : « faut vraiment que je me remette au fractionné bordel ».
Crédits photo : Anwar Jazouani
Les relais défilent à la chaîne, à peine remontés que nous nous remettons dans la file pour repartir. Avec parfois des stratégies originales pour se motiver. N’est-ce pas Florian et son ravitaillement à la Chouffe ?
Crédits photo : Nefer Descamps
Et les minutes passent. Une par une. Pour enfin nous amener à la fin de ces 31h15 de folie. Et enfin nous retrouver pour la première fois à 8 pour une photo souvenir.
Bilan d’une incroyable aventure
C’était pas gagné d’avance, au vu du challenge de taille. Mais globalement ça s’est plutôt bien passé. Pas de gros craquage, pas de pleurs, pas d’engueulades. Des allures et des performances monstrueuses. 464 kilomètres au global, sur une allure moyenne de 4’02 au kilomètre. Énorme. Avec des statistiques individuelles dont on aurait chacun jamais rêvé. Tellement de choses apprises sur nous, notre mental, nos corps, notre capacité à relancer à chaque fois, à nous remobiliser. Beaucoup de Kinder et de Tuc. Beaucoup de sel aussi (content Yohan ?).
Surtout, beaucoup d’amour, d’encouragements, de supporters, d’accompagnants. Et une organisation au top. Sans toutes ces personnes, cet événement n’aurait jamais été aussi extraordinaire, et nous n’aurions certainement pas eu la même force pour affronter ces terribles longues heures. Une preuve de plus de la force du groupe et du collectif, pour dépasser toutes les difficultés.
C’était beau, c’était grand, c’était puissant. Et sacrément débile. Mais c’était bien. Genre limite on re-signerait pour pareille aventure. Si si, je vous assure. A quand le prochain défi du genre ?
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