Marathon Berlin

5 ans de course à pied, retour sur un parcours fractionné (2/2)

Suite de l’article présent ici.

Ça aurait été trop beau de continuer sur cette lancée, il fallait bien passer par cette case que tout sportif connait à un moment donné : la blessure. J’avais déjà le genou amoché avant le marathon, je me le suis achevé pendant la course. A la reprise, douleurs fulgurantes au bout d’à peine quelques séances. Sortie de piste. Quelques semaines de repos de plus, reprise : encore davantage de douleurs. Verdict : un bon syndrome rotulien, dû à une absence de renforcement musculaire. Comme on dit, c’est en tombant qu’on apprend. Il m’aura donc fallu pas mal de soirées bien fun à me mettre de la glace sur le genou pour que je comprenne que courir c’est pas juste aller gambader baskets aux pieds. Sportif en carton, mais j’apprends.

Je reprends timidement, me fait une partie du GR20 en guise de vacances pour égailler l’été (faire la randonnée la plus dure d’Europe quand on a jamais fait de randonnée, encore une bien belle idée), puis reprends plus sérieusement à la rentrée. Celle-ci coïncide toutefois avec ma dernière période de vie étudiante en école de commerce. Retour à Rouen, et donc très peu de courses disponibles, un emploi du temps très fluctuant (incertain diront certains), pas de quoi aller vraiment chercher de grands objectifs. Je m’habitue toutefois de nouveau à une routine de 2/3 séances par semaine, bats mon record sur semi-marathon pour la forme, et termine l’année sur un total de 1001 kms.

Je m’apprête donc à me lancer dans une seconde préparation marathon sur de bonnes bases, avec pas mal de temps pour faire mes entrainements en plus car j’étais alors retourné dans ma Picardie natale en attente de trouver un boulot. Et la machine s’est enrayée. Première inflammation, légère. Seconde inflammation, déjà un peu plus alarmante. Troisième inflammation, sur les tendons fibulaires, plus costaud et qui m’impose une semaine de repos. Quatrième blessure, celle qui fait mal, un début d’aponévrosite (en gros une inflammation sous le talon). Difficultés à marcher et à poser le talon, les deux semaines nécessaires au traitement auront clairement été davantage passées sur youtube à ruminer que sur les pistes.

A 3 semaines du marathon, je sais maintenant ma préparation complètement flinguée, mes espoirs de chrono annihilés. Je retente de partir courir, et bim une cinquième inflammation, sur le tendon d’Achille. La blessure de trop. J’arrête, j’abandonne, trop c’est trop. La mort dans l’âme, désespéré, je cherche à revendre mon dossard. Mais cet état d’esprit négatif n’aura que bien peu duré. C’est en voyant d’autres coureurs s’entraîner que, frustré comme jamais, je décide de prendre quand même le départ du marathon. J’ai payé ce dossard, ce n’est pas pour le brader. Et surtout, je n’ai aucune envie de baisser les bras maintenant. Alors on y va, coûte que coûte, quitte à ne pas le finir, à marcher, à reprendre le métro à mi-chemin, mais on y va pour profiter de ce que mon corps me laissera bien courir. Je me doute bien que je n’irai pas au bout, que je devrais m’arrêter et abandonner en cours de route, mais cela ne doit pas m’empêcher d’aller profiter de la fête pendant au moins une partie de la course.

Et c’est ainsi que je me retrouve sur les starting blocks ce dimanche d’avril 2017, sous forte chaleur (ce running gag, tu t’entraines dans le froid tout l’hiver pour qu’il refasse chaud pile le jour du marathon). Je prends le départ, sans entrainement, en ayant couru en tout et pour tout 3 fois durant les 6 dernières semaines. Je profite tout sourire de l’ambiance, de cette ivresse inespérée. Et les kilomètres filent peu à peu. J’atteints le semi-marathon, ça commence à tirer un peu mais ça va. Alors je continue, enchaine les kilomètres un à un, dépasse les 25, me rapproche des 30. Et au fur et à mesure me rends de plus en plus compte de ce que je suis en train de faire : « Mais ça y est, je vais le faire, je vais le finir en fait ». J’arrive à tirer sur la corde jusqu’au 33e kilomètre, puis alterne la marche et la course à partir de là, les jambes n’étant bien évidemment pas assez entraînées pour continuer à me faire galoper plus longtemps. Je finis néanmoins en 4h03, joli temps, et tellement inespéré au vu de ces dernières semaines d’enfer. Une belle revanche sur les blessures, sur ces coups durs, sur ces moments de désespoir, pour ce rêve qui a failli s’envoler. 

Running communautaire

Après une pause de mise, je reprends ensuite tranquillement la course en ce mois de mai 2017. Un mois qui marquera une nouvelle phase dans ma vie de runner. Etant revenu définitivement à Paris, je trouve un groupe avec qui courir pour rompre avec ces longues séances solitaires qui commençaient à sérieusement me peser. J’avais fait quelques séances avec un groupe à Vincennes l’année précédente, Vincennes Run Run. J’ai cette fois-ci opté pour Adidas Runners, et notamment le quartier de Bastille, afin de profiter des nombreux groupes créés selon les envies de distance et d’allure de chacun, de quoi trouver chaussure à son pied.

Mon intégration dans ce groupe a littéralement changé ma façon de vivre la course à pied. De runner solitaire enchainant péniblement des séances sans grande structure, j’ai commencé à côtoyer et me lier d’amitié avec d’autres runners, et à aller prendre davantage de conseils à droite à gauche. J’ai commencé à penser davantage mon entrainement, à mieux enchainer les différentes séances, à faire ce qui était nécessaire pour aller chercher des performances.

Les séances du mercredi soir avec AR Bastille m’ont permis de me confronter à de meilleurs runners, de me pousser pour les suivre sur leurs sorties, d’aller me faire des 16 kms un soir de semaine après le boulot (juste impensable avant), d’aller me faire du mal sur des fractionnés. Et ça a payé, petit à petit. Au fil des mois, je me suis vu progresser, aller battre mes records, chercher une vitesse dont je ne me serais jamais cru capable. J’ai appris, me suis battu, ai parfois souffert (mais toujours avec le sourire à la fin, un peu barjo le mec), et me suis ouvert véritablement au monde du running, ses séances spécifiques, son jargon incompréhensible, ses besoins, ses codes instagram et surtout sa formidable solidarité entre coureurs. Je m’y suis fait des potes avec qui courir, partager des bières, à aller rejoindre sur des courses à Paris ou ailleurs. Je me suis mis à davantage partager mes séances, mes courses et autres activités sportives sur les réseaux sociaux et mon compte instagram notamment (et sur ce blog désormais également), découvrant tout un petit milieu running très connecté.

Cette intégration s’est donc traduite par de nouvelles belles performances, d’un goût toujours plus affirmé pour les RP (Records Personnels), pour la vitesse, pour me pousser toujours plus. La seconde partie d’année 2017 aura ainsi été marquée notamment par un nouveau record sur le marathon Nice-Cannes. La course parfaite tout simplement, maitrisée de bout en bout, avec au final un temps canon de 3h11 quand je visais juste de passer sous les 3h30… Une préparation s’étant passée à la perfection, un bon jour, une météo favorable, un parcours clairement pas dégueu, des jambes qui démangent un peu et te poussent à prendre un peu d’avance sur le rythme prévu, et au fur et à mesure tu te rends compte que tu peux réaliser l’impossible. Passer sous la barre des 3h15 c’était un peu mon graal sur marathon, l’objectif que je ne pensais réaliser qu’à mon sommet, après encore bien davantage de pratique. Vous n’imaginez donc même pas ce ravissement, l’émerveillement qui s’emparaient de moi sur les derniers kilomètres et à l’arrivée en réalisant que j’allais dépasser cette barre de plus. Magique.

Ouverture à de nouveaux horizons

2018, nouvelle année, nouveaux objectifs. Et pour cette année, on hausse clairement le niveau et on passe un nouveau cap. Je me décide à ne plus me fixer de limites, à me prendre à rêver toujours plus haut, et surtout à aller les chercher le couteau entre les dents ces rêves. Pour cette année 2018, ce sera donc de nouveaux records à aller chercher sur le bitume, mais également la découverte du trail et du triathlon. Nouvelles disciplines, et donc nouvelles sensations à découvrir, nouveaux horizons à repousser, et toujours plus d’entrainements et de kilomètres à parcourir.

Je muscle donc mon jeu, passe de manière régulière à 4 séances par semaine (toujours plus Robert), accumule les kilomètres plus vite que les bières (c’est donc ça de vieillir ?). Un début de saison en demie teinte pourtant sur le bitume, car je bats mon record sur 10k et semi-marathon, mais de manière très décevante pour ce dernier. Pas de record en revanche sur marathon, cette distance loterie où tout peut arriver.

Grosses découvertes sur le trail et le triathlon : découvertes de paysages de malade, d’une gestion de course tellement différente, d’une logistique particulière, et de ravitaillements gargantuesques sur le trail (uhm le saucisson et les TUC). Découverte des réveils à 6h30 pour aller s’entrainer à la piscine et comprendre qu’on ne sait pas nager aussi. Des doubles/triples séances dans la journée quand tu as la bonne idée de caler préparation marathon et préparation triathlon en même temps (génie, ou pas). On notera de grosses qualités d’organisation pour placer tout cela entre deux dodos. Un été très sportif donc, fatiguant, mais qui fait passer les 4 séances de course à pied pour une vaste blague ou une petite semaine de vacances. A partir de quand ma vie a-t-elle donc dérapé au point qu’il me semble que 4 séances et 60 kms est une semaine cool ? Vaste question, vous avez 4h. Ou 3h04, le temps que je cours un marathon.

Le marathon justement, cette distance reine, chouchou ou honnie, sur laquelle je suis une nouvelle fois venue me casser les dents en septembre, à Berlin. Le gros objectif de l’année clairement, the big one, celui sur lequel je compte le plus, pour lequel je me prépare le plus. Pas la réussite attendue, un RP quand même, et surtout que de chemin parcouru entre temps. La préparation pour cet objectif, cette barre mythique des 3h à encore aller chercher (je l’aurai un jour, je l’aurai), m’a permis encore de hausser mon niveau de jeu, d’aller toujours plus vite, plus haut, plus fort. 

Et maintenant ?

Et maintenant oui, que faire ? Après 5 ans de hauts et de bas, de progression, de nouveaux défis, de courses folles, de milliers de kilomètres parcourus, que faire ? Et bien tout simplement continuer à aller chercher de nouvelles performances, de nouveaux défis à relever, de nouvelles courses à découvrir, de nouveaux moyens de me dépasser et d’aller chercher le meilleur de moi-même. Et surtout, surtout, continuer à prendre du plaisir.

Car oui il y a toujours des courses à faire, des sommets à gravir, des records à battre, des rêves à vivre. J’en ai plein en tête, et certains viennent très vite…

To be continued.

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